Simenon, Georges - Le fou de Bergerac
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Simenon, Georges - Le fou de Bergerac краткое содержание
Hasard sur toute la ligne ! La veille, Maigret ne savait pas qu’il allait entreprendre un voyage. C’était pourtant la saison où Paris commençait à lui peser : un mois de mars épicé d’un avant-goût de printemps, avec un soleil clair, pointu, déjà tiède. Mme Maigret était en Alsace pour une quinzaine de jours, auprès de sa sœur qui attendait un bébé. Or, le mercredi matin, le commissaire recevait une lettre d’un collègue de la Police Judiciaire qui avait pris sa retraite deux ans plus tôt et qui s’était installé en Dordogne. … Surtout, si un bon vent t’amène dans la région, ne manque pas de venir passer quelques jours chez moi. J’ai une vieille servante qui n’est contente que quand il y a du monde à la maison. Et la saison du saumon commence…
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— Je vous ai promis que le fou serait ici et il est probable qu’il y est.
Il n’était entré que trois personnes : un cantonnier qui avait vu, trois jours auparavant, une « ombre se faufiler entre les arbres » et s’enfuir à son approche.
— L’ombre ne vous a rien fait ?
— Non !
— Et vous ne l’avez pas reconnue ? Va pour cinquante francs !
Maigret était le seul à garder sa bonne humeur. Sur la place, il y avait une bonne trentaine d’habitants, par groupes, qui regardaient les fenêtres de l’hôtel.
— Et toi ?
C’était un vieux paysan en deuil qui attendait, le regard farouche.
— Je suis le père de la première qui est morte. Eh bien ! je suis venu dire que, si je mets la main sur ce monstre-là, je…
Et lui aussi avait une tendance à se tourner vers le procureur.
— Vous n’avez aucune idée ?
— Une idée, peut-être pas ! Mais je dis ce que je dis, moi ! On ne peut rien faire à un homme qui a perdu sa fille ! On ferait mieux de chercher du côté où il y a déjà eu quelque chose. Je sais bien que vous n’êtes pas du pays… Vous ne savez pas… Tout le monde vous dira qu’il est arrivé des choses dont on n’a jamais su le fin mot…
Le médecin s’était levé, en proie à l’impatience. Le commissaire de police regardait ailleurs, en homme qui ne veut pas entendre. Quant au procureur, il était de pierre.
— Je vous remercie, mon vieux.
— Et surtout je ne veux ni de vos cinquante, ni de vos cent francs… Si un jour vous pouvez passer à la ferme… N’importe qui vous dira où elle se trouve.
Il ne demanda pas s’il devait rester. Il ne salua personne et s’en alla, les épaules rondes.
Son départ fut suivi d’un long silence et Maigret affecta d’être très occupé à tasser, de la seule main qu’il avait valide, la cendre dans sa pipe.
— Une allumette, Leduc…
Ce silence avait quelque chose de pathétique. Et on eût dit que les groupes épars sur la place évitaient, eux aussi, de faire le moindre bruit.
Rien que les pas du vieux fermier sur les graviers…
— Je te prie de te taire, entends-tu ?
C’était le fiancé de Rosalie qui se surprenait à parler haut et la fille regardait droit devant elle, peut-être matée, peut-être hésitante.
— Eh bien ! messieurs, soupira enfin Maigret, il me semble que cela ne va déjà pas si mal…
— Tous ces interrogatoires ont déjà été faits ! répliqua le commissaire en se levant et en cherchant son chapeau.
— Seulement, cette fois, le fou est ici !
Maigret ne regardait personne. Il parlait en fixant la courtepointe blanche de son lit.
— Est-ce que vous croyez, docteur, que, ses crises passées, il se souvienne de ce qu’il a fait ?
— C’est à peu près certain.
Le patron de l’hôtel était debout au milieu de la pièce et ce détail accroissait son embarras car, avec ses vêtements blancs, il attirait les regards.
— Va voir, Leduc, s’il y a encore du monde qui attend !
— Vous m’excuserez, mais je n’ai plus le temps ! fit le docteur Rivaud en se levant. J’ai une consultation à onze heures et, là aussi, il s’agit de la vie d’un homme.
— Je vous accompagne… murmura le commissaire de police.
— Et vous, monsieur le procureur ? murmura Maigret.
— Heu !… je… Oui… je…
Depuis quelques instants, Maigret ne paraissait pas satisfait et à plusieurs reprises il regarda vers la place avec impatience. Soudain, comme tout le monde était debout, prêt à partir, il se dressa légèrement sur son lit, murmura :
— Enfin !… Un instant, messieurs… Je crois que voici du nouveau…
Et il désignait une femme qui courait, se dirigeant vers l’hôtel. De sa place, le chirurgien pouvait la voir et il dit avec étonnement :
— Françoise !…
— Vous la connaissez ?
— C’est ma belle-sœur… Sans doute un malade a-t-il téléphoné… ou un accident…
On courait dans l’escalier. On parlait. La porte s’ouvrait et une jeune femme, haletante, pénétrait dans la chambre, regardait autour d’elle avec épouvante.
— Jacques !… Commissaire !… Monsieur le procureur…
Elle n’avait pas plus de vingt ans. Elle était mince, nerveuse, jolie.
Mais il y avait des traces de poussière sur sa robe. Son corsage était en partie déchiré. Elle portait sans cesse les deux mains à son cou.
— Je… Je l’ai vu… Et il m’a…
Personne ne bougeait. Elle avait de la peine à parler. Elle fit encore deux pas dans la direction de son beau-frère.
— Regarde !
Elle lui montrait son cou où l’on voyait des ecchymoses. Elle continuait à parler.
— Là… dans le bois du Moulin-Neuf… Je me promenais quand un homme…
— Je vous disais bien que nous saurions quelque chose ! grommela Maigret qui avait retrouvé sa placidité.
Leduc, qui le connaissait à fond, le regarda avec étonnement.
— Vous l’avez vu, vous, n’est-ce pas ? poursuivit Maigret.
— Pas longtemps ! Je ne sais pas comment j’ai fait pour me débarrasser de son étreinte… Je crois qu’il a heurté du pied une souche d’arbre… J’en ai profité pour frapper…
— Décrivez-le donc…
— Je ne sais pas… Un vagabond, sans doute… Avec des vêtements de paysan… De grandes oreilles très décollées… Je ne l’avais jamais vu…
— Il s’est enfui ?
— Il a compris que j’allais crier… On entendait le bruit d’une auto sur la route… Il s’est précipité vers les fourrés…
Elle reprenait peu à peu son souffle, gardait une main sur son cou, l’autre sur son sein.
— J’ai eu tellement peur… Peut-être que, sans le bruit de l’auto… J’ai couru jusqu’ici…
— Pardon ! N’étiez-vous pas plus près de la villa ?
— Là-bas, je savais qu’il n’y avait que ma sœur.
— C’était à gauche de la ferme ? questionna le commissaire de police.
— Tout de suite après la carrière abandonnée.
Et le commissaire, au procureur :
— Je vais faire fouiller le bois… Peut-être est-il encore temps ?
Le docteur Rivaud paraissait contrarié. Les sourcils froncés, il regardait sa belle-sœur qui s’était appuyée à la table et qui respirait plus normalement.
Leduc cherchait le regard de Maigret et, quand il parvint à le rencontrer, il ne cacha pas son ironie.
— Tout ceci semble prouver, en tout cas, éprouva-t-il le besoin d’insister, que le fou n’était pas ici ce matin.
Le commissaire de police descendait l’escalier, tournait à droite vers la mairie où il avait ses bureaux. Le procureur, lentement, brossait son chapeau melon du revers de la manche.
— Dès que le juge d’instruction reviendra de Saintes, mademoiselle, je vous demanderai de vous présenter à son cabinet, afin de renouveler vos déclarations et de signer le procès-verbal.
Il tendit à Maigret une main sèche.
— Je suppose que vous n’avez plus besoin de nous !
— Bien entendu ! Je n’espérais d’ailleurs pas vous voir vous déranger…
Maigret fit un signe à Leduc, qui comprit qu’il devait mettre tout le monde dehors. Rosalie et son fiancé se disputaient toujours.
Quand Leduc revint vers le lit, un sourire aux lèvres, il fut étonné de voir à son ami un visage sévère, anxieux.
— Eh bien ?
— Rien !
— Cela n’a pas donné !
— Cela a trop donné ! Bourre-moi encore une pipe, veux-tu, tant que ma femme n’est pas ici…
— Il me semblait que le fou devait venir ce matin.
— Parbleu !
— Pourtant…
— N’insiste pas, mon vieux. Ce qui serait terrible, vois-tu, c’est qu’il y ait encore une morte. Parce que, cette fois-ci…
— Quoi ?
— N’essaie pas de comprendre. Bon ! Voilà ma femme qui traverse la place. Elle va me dire que je fume trop et cacher mon tabac. Glisses-en donc un peu sous l’oreiller…
Il avait chaud. Peut-être même était-il légèrement congestionné.
— Va !… Laisse l’appareil téléphonique à côté de moi.
— Je compte déjeuner à l’hôtel. C’est le jour du confit d’oie. Je viendrai te serrer la main après midi…
— Si tu veux !… À propos, la petite… Tu sais, celle dont tu m’as parlé… Il y a longtemps que vous… que tu ne l’as vue ?…
Leduc tressaillit, regarda son camarade dans les yeux, gronda :
— C’est trop fort !
Et il sortit en oubliant son chapeau de paille sur la table.
V
Les souliers vernis
— Oui, madame… À l’Hôtel d’Angleterre… Il est bien entendu que vous êtes tout à fait libre de ne pas venir.
Leduc venait de sortir. M me Maigret montait l’escalier. Le docteur, sa belle-sœur et le procureur étaient arrêtés sur la place, près de l’auto de Rivaud.
C’était à M me Rivaud, qui devait être seule chez elle, que Maigret téléphonait. Il la priait de venir à l’hôtel, ne s’étonnait pas d’entendre une voix inquiète à l’autre bout du fil.
M me Maigret écoutait la fin de la conversation, se débarrassait de son chapeau.
— C’est vrai qu’il y a encore eu une agression ?… J’ai rencontré des gens qui se précipitaient vers le Moulin-Neuf…
Maigret ne répondit pas, absorbé qu’il était par ses réflexions. Il voyait peu à peu changer le mouvement de la ville. La nouvelle circulait rapidement et des gens de plus en plus nombreux convergeaient vers un chemin s’amorçant à gauche de la place.
— Il doit y avoir un passage à niveau !… murmura Maigret, qui commençait à connaître la topographie de la ville.
— Oui ! C’est une longue rue, qui ressemble d’abord à une rue de ville et qui finit en chemin de terre. Le Moulin-Neuf est après le deuxième tournant. Il n’y a d’ailleurs plus de moulin, mais une grosse ferme, aux murs blancs. Quand je suis passée, on attelait des bœufs, dans une cour pleine de volailles. Il y a entre autres de beaux dindons.
Maigret écoutait à la façon d’un aveugle à qui on décrit un paysage.
— Il y a beaucoup de terres ?
— Ici, ils comptent par journaux. On m’a dit deux cents journaux, mais je ne sais pas combien cela fait. En tout cas, les bois commencent tout de suite. Plus loin, on croise la grand-route qui va à Périgueux…
Les gendarmes devaient être là-bas, et les quelques gardiens de la paix de Bergerac. Maigret les imaginait allant et venant à grandes enjambées dans les broussailles, comme pour une battue au lapin. Et les groupes arrêtés sur la route, les gosses grimpés sur les arbres…
— Maintenant, tu devrais me laisser. Retourne là-bas, veux-tu ?
Elle ne discuta pas. Comme elle sortait, elle croisa une jeune femme qui entrait à l’hôtel et elle se retourna avec étonnement, peut-être avec un rien de mauvaise humeur.
C’était M me Rivaud.
— Asseyez-vous, je vous en prie. Et pardonnez-moi de vous avoir dérangée, surtout pour si peu de chose. Car je me demande même si j’ai des questions à vous poser ! Cette affaire est tellement embrouillée…
Il ne la quittait pas des yeux et elle restait comme hypnotisée sous son regard.
Maigret était étonné, mais pas désorienté. Il avait vaguement deviné que M me Rivaud l’intéresserait, et il s’apercevait que c’était une figure beaucoup plus curieuse qu’il n’avait osé l’espérer.
Sa sœur Françoise était fine, élégante, et rien en elle ne trahissait la campagne ou la petite ville.
M me Rivaud attirait beaucoup moins le regard et ce n’était même pas ce que l’on peut appeler une jolie femme.
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